1)  La croissance économique « remonte » largement vers une poignée de privilégiés
2) Quelle (dé)croissance ?
3) Quelle croissance économique… pour un mode de vie équitable et soutenable ?

 

1)  La croissance économique « remonte » largement vers une poignée de privilégiés (Olivier De Schutter)

Une récente carte blanche parue dans The Guardian.

« La croissance économique apportera la prospérité à tous ». Tel est le mantra qui guide la prise de décision de la grande majorité des hommes politiques, des économistes et même des organismes de défense des droits de l’homme.

Pourtant, la réalité – telle qu’elle est décrite dans un rapport présenté en juillet 2024 au Conseil des droits de l’homme des Nations unies – montre que si l’éradication de la pauvreté a toujours été promise grâce au « ruissellement » ou à la « redistribution » des richesses, la croissance économique « remonte » largement vers une poignée de privilégiés (…).

Des mesures concrètes peuvent être prises dès maintenant, en commençant par choisir des mesures de progrès autres que le produit intérieur brut (PIB), qui ne nous dit rien sur les retombées écologiques ou sociales de l’activité économique (…) [et donc sur l’habitabilité de la planète et le bien-être].

Il s’agit d’une entreprise de grande envergure. Les obstacles sont réels : la plupart des gens ont été amenés à croire que la croissance économique était synonyme de progrès humain. Pourtant, un mouvement de plus en plus important s’élève contre notre modèle économique axé sur la croissance : les défenseurs du climat, les travailleurs et les syndicats, les scientifiques et les universitaires, les jeunes, les défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme, les peuples autochtones, les économistes progressistes et les militants qui luttent contre les inégalités, les disparités entre les hommes et les femmes et le colonialisme s’élèvent contre cette idée.

Source : https://www.theguardian.com/global-development/article/2024/jul/02/obsession-with-growth-is-enriching-elites-and-killing-the-planet-we-need-an-economy-based-on-human-rights-olivier-de-schutter

2) Quelle (dé)croissance ?  (Réflexions de Bruno Colmant)

« J’ai longtemps combattu l’idée de la décroissance. Aujourd’hui, je crois qu’un débat citoyen s’impose.

Il faut restaurer le culte de l’intérêt collectif. La troisième voie vers un projet sociétal ambitieux est peut-être de combiner une moindre croissance du capitalisme d’accumulation, une taxation du carbone et la promotion de la recherche. »

Source : https://www.lalibre.be/debats/opinions/2022/10/16/bruno-colmant-jai-longtemps-combattu-lidee-de-la-decroissance-aujourdhui-je-crois-quun-debat-citoyen-simpose-STM35NYXQRC3RF55VAW6FWH2HQ/

“Les marchés fonctionnent par anticipation de la richesse future et donc l’économie de marché consiste en un capitalisme d’aspiration du futur, contrairement au capitalisme rhénan (qu’on a connu dans les années 60 et 70) qui lui partage ce qui est accompli. On peut donc dire que l’économie de marché telle que promue par le néolibéralisme a transformé le vecteur du temps ce qui a entrainé une surexploitation de la nature. On veut une jouissance immédiate, au détriment de la nature qui n’a pas le temps de se régénérer”.

Le néolibéralisme ne s’intéresse pas à l’humain, qu’il considère comme une externalité [au même titre que la nature], ni à son bien-être. Le néolibéralisme est une décision politique qui favorise seulement la croissance de l’économie de marché. (…) Il n’y a pas de projet pour l’humain, c’est un système qui conduit à l’épuiser. Il est par nature inégalitaire et surexploite la planète”.

Source : https://www.rtbf.be/article/bruno-colmant-dans-l-economie-de-marche-il-n-y-a-pas-de-projet-pour-l-humain-vers-la-fin-du-neoliberalisme-11071562

« Le capitalisme néolibéral n’est plus compatible avec le défi climatique. »

Source : https://www.lecho.be/economie-politique/belgique/economie/le-capitalisme-doit-il-s-incliner-face-au-defi-climatique/10407470.html

« Il faut remettre l’État au centre de la gestion des économies – le réhabiliter en qualité d’État stratège. Autrement dit : repenser l’équilibre entre le marché et l’État – et donc le dialogue entre les pouvoirs publics et la sphère privée.

S’il faut le définir d’une phrase, je dirais que l’État stratège est celui qui a, comme il se doit, son mot à dire pour tout ce qui concerne le bien-être des futures générations – et en priorité tous les biens publics présents ou à venir : la santé, l’éducation, l’énergie… Autrement dit : dans tous les domaines qui exigent une vision, une planification à long terme, que le secteur privé assure mal. »

Source : https://www.lesoir.be/443994/article/2022-05-23/bruno-colmant-preparons-nous-vivre-des-annees-difficiles

« La remédiation climatique ne va pas être aisée, elle va coûter de l’argent, de l’énergie et du bien-être. Le capitalisme ne s’adaptera pas de sa propre initiative. Une première étape simple serait d’imposer aux entreprises un bilan environnemental. Une comptabilité qui prendrait les trois facteurs en compte : le travail, le capital, et l’interaction avec la nature. »

« La transition environnementale passera par le rendement du capital, et il faudra dans un premier temps que les entreprises soient d’autorité dépossédées d’une partie de leur profit pour financer les adaptations sociétales. »

« L’ère de l’individualisme touche à sa fin si nous voulons pouvoir survivre dans un monde menacé. Si le seul projet de société c’est d’échapper de manière individuelle ou avec sa famille aux grands malheurs qui vont nous assaillir, nous faisons une erreur. Nous ne pensons pas ‘collectif’, comme on dit au football. Nous n’avons pas la prise de conscience que c’est un problème qui doit être géré par tout le monde, tous ensemble. »

« Dans les années 60 il y avait une confiance en l’état, une confiance dans l’équilibre que l’état pouvait assurer. Puis on est passé d’un système de protection étatique à un système de protection individuel. Mais il n’y a pas de société sans solidarité. On va devoir repenser le système social, le système fiscal et la sécurité sociale. Le néolibéralisme nous a appris le narcissisme, la surconsommation et l’âpreté au gain. J’espère que nous n’allons pas repousser les limites du narcissisme au point de refuser de regarder en face les événements qui s’annoncent. »

Source : https://www.rtbf.be/article/bruno-colmant-une-partie-de-la-rentabilite-des-entreprises-devra-etre-utilisee-pour-la-transition-climatique-11146521

« J’avais dû lire en 1976 L’utopie ou la mort (René Dumont) : et bien tout y est prévu mais quasiment à l’année près. … c’est un tout petit peu dangereux de juxtaposer le néolibéralisme et les problèmes d’écologie. (…)

Je demande aussi, est-ce que la prise de conscience n’est pas un substitut à l’action ? On fait beaucoup de colloques, finalement, sur l’écologie mais dans le fond, est-ce que la prise de conscience n’est pas une façon de se dire que parce qu’on est en conscience, on a changé quelque chose ? – La réponse est non. Est-ce que l’intellectualisme que démontrent certains n’est pas lui-même un alibi pour faire repousser sur les autres ce qu’on n’a pas envie de changer en nous-mêmes ? »
« … on ne peut pas être dans une logique de capitalisme et d’accumulation qui nous caractérise tous, dans une logique de consommation, dans une logique de jouissance narcissique, du présent au détriment du futur et préserver la planète. Ce n’est pas possible. Nous sommes dans une logique où aujourd’hui nous voulons absolument profiter d’un présent, peut-être d’autant plus qu’on sait qu’il n’y a pas d’avenir, au détriment de ce même avenir. C’est ça la réalité ! »

Source : https://www.rencontres-elisee-reclus.org/compilationRERs.php

3) Quelle croissance économique… pour un mode de vie équitable et soutenable ? (Groupe « Chantier d’avenir »)

« L’humanité aborde le prochain siècle sans pitié aucune, avec la même avidité et la même myopie qui lui ont permis autrefois de s’approprier des continents entiers. Nous colonisons l’avenir ».

(David Van Reybrouck)

Pour en savoir plus, rendez-vous sur : https://www.ilesttempsnew.be/2024/09/05/quelle-croissance-economique-pour-un-mode-de-vie-equitable-et-soutenable